Christian Mariotto : Mental Palace

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Fédéré autour des compositions du batteur, le groupe est formé de Philippe Canovas à la guitare, complice de longue date, essentiel au panorama sonore de l’orchestre, de Nicolas Gegout aux saxophones et de Julien Moneret à la contrebasse, deux jeunes musiciens talentueux dont l’énergie vitale vient souffler dans les voiles de cette proposition musicale.

Située à la croisée des chemins du jazz tous azimuts, du rock progressif, de la pop et des emprunts à la musique improvisée, la musique de Christian Mariotto est lyrique et poétique. Elle est inexorablement tournée vers la quête d’un chant intérieur, sous-tendu par une énergie brute puisée au creux d’un « palais mental », qui raconte son histoire et cherche à être entendu et partagé avec tous.

Christian Mariotto : Batterie Compositions
Nicolas Gegout : Saxophones
Philippe Canovas : Guitare
Julien Moneret : Contrebasse

 

Texte de présentation Christi an Mariotto Mental Palace par D. Desassis

L’idée du temps est par essence multiple chez un musicien tel que Christian Mariotto. Il y a bien sûr celui qui imprime la pulsation ou, de façon plus discrète, suggère le mouvement à suivre. On pourra alors parler de tempo et de rythme, une définition que le batteur connaît à l’évidence sur le bout des baguettes et vit au plus profond d’un jeu capable d’explosion tout autant que de suggestion. Mais le temps est aussi philosophique, synonyme à la fois de durée et de perception, pour ne pas dire de conception, de la vie elle-même. Et c’est sans doute ce temps-là – passé, présent, à venir – qui conduit Christian Mariotto à s’exposer de manière personnelle après avoir multiplié des expériences ayant permis de mesurer le spectre de ses inspirations et la force intérieure qui l’anime. Pour n’avoir pas été « en haut de l’affiche » depuis de longues années, cet homme du sud qui a posé un beau jour ses valises en Lorraine n’en a pas moins été partie prenante d’expéditions musicales fécondes. Ainsi les aventures exploratoires du Bernica Octet et d’une de ses émanations en quartet, le rougeoyant Ark 4 ; ou le trio Tu Danses ? sous lequel couve un feu hérité aussi bien de Paul Motian que de John Coltrane ; ou bien encore Shoplifters, à la croisée d’autres chemins, parmi lesquels ceux d’une new wave venue d’Angleterre. On comprend alors que tout ce qui se joue chez lui procède de ce qu’il a choisi de nommer son « palais mental », en référence notamment à Sherlock Holmes qui savait mobiliser les méandres de sa mémoire et le moindre de ses souvenirs pour résoudre des énigmes. Ce lieu unique est le terrain privilégié de sa création : « Mes compositions interrogent la mémoire affective et émotionnelle liée à la musique ; cette forme d’expression à la fois concrète et abstraite qui contribue à nos vies et à notre construction en tant qu’individus sensibles ».

Oui, une énigme. La musique en est une et Christian Mariotto en sait la dimension kaléidoscopique. Il l’a prouvé par le passé et veut célébrer la richesse de ses formes par la libération d’un chant intérieur essentiel à ses yeux. Il s’agit pour lui d’élaborer un langage suffisamment ouvert, qui englobe toutes ses envies, toutes ses influences. On trouvera donc dans le voyage en onze étapes qui forment Mental Palace la traduction d’une histoire personnelle, qu’il lui fallait partager avec des partenaires pleinement associés à son parcours : « Mon palais mental est à la croisée des chemins du rock, du jazz, de la pop, d’un soupçon de musique classique et des musiques improvisées ». Mais le batteur va au-delà de cette intention généraliste et du simple exposé des paysages qui défilent dans son imaginaire. Il œuvre à une conception humaniste de son travail, une nécessité pour lui, en associant les générations avec un véritable groupe dont il a la responsabilité, sans pour autant en être le leader dominant. Car si l’on trouve à ses côtés le fidèle Philippe Canovas, guitariste partenaire de Tu Danses ? et de Shoplifters, la présence de Nicolas Gégout (saxophones, clarinette, flûte) et de Julien Moneret (contrebasse), ses anciens élèves du Conservatoire, fournit un indice important sur sa volonté de partage et, surtout, de transmission. Demain est déjà là.

On sait donc que ce jazz-là a eu la patience de laisser infuser des amours multiples, revendiquées comme telles. Ainsi cette école anglaise, un peu dandy et ténébreuse dans son désenchantement scandé sur la composition-titre par un saxophone en un appel vibrant faisant écho au groupe de Robert Smith, The Cure. L’énergie est au bien rendez-vous, alimentée par le jeu polyphonique de Christian Mariotto. La diversité de ses approches et sa capacité à contenir sa force sont la marque d’un drumming d’une haute précision. Sa batterie est l’instrument d’un coloriste, l’agent actif aussi bien de la pulsation que de la suggestion, tout au long d’un disque dont les compositions sont souvent façonnées en plusieurs mouvements, conçus à la manière de suites. Caractéristique de cette diversité structurelle, « Driftwood » et son glissement progressif d’une mélodie joyeuse, presque légère, vers une improvisation de nature introspective qui nous rappelle que cette musique est une célébration de la liberté en même temps qu’une invitation à laisser libre cours à l’imagination. Philippe Canovas, particulièrement à l’aise au cœur de cette ébullition créative, multiplie les nuances, forgeant une trame aux formes mouvantes, d’une présence constante dessinée en contrepoints électriques. L’élaboration de ses textures est celle d’un sculpteur sonore héritier en droite ligne d’un Bill Frisell ou d’un Pat Metheny. La nouvelle génération en action dans ce quartet s’expose quant à elle avec tout l’aplomb de la jeunesse – Nicolas Gegout déploie ici un jeu très habité, d’un grand lyrisme, au saxophone, à la flûte ou à la clarinette – et la maîtrise requise par un répertoire aux références savantes qui n’oublie pas de faire justice à quelques-unes des figures tutélaires de l’histoire du jazz : ici Coltrane (« Aigoual » et sa citation de « Reverend King »), là Paul Motian dans les contemplatifs « El Camino » ou « Bright Star ». En guise de cerise bien juteuse sur le gâteau, Christian Mariotto n’omet pas de rendre un double hommage à son histoire personnelle du rock : c’est Marquis de Sade tout d’abord, avec « MS » en hommage à Philippe Pascal et une émouvante conclusion par Julien Moneret dans un solo de contrebasse ouvrant la route à « The Waterboys » dédié à Lou Reed. Une oreille attentive n’oubliera pas d’entendre quelques échos d’un rock progressif dont le batteur s’est certainement nourri, ce que traduit en particulier « Traversées » et sa flûte néo-crimsonienne, une composition dont le final permet d’entendre l’unique (et assez bref) solo de batterie du disque.

Christian Mariotto insiste beaucoup sur l’idée d’un chant intérieur brut qu’il lui faut libérer à travers sa musique. Mental Palace est bien le dictionnaire amoureux de ce chant. Sa gestation lente et longue donne aujourd’hui naissance à un disque dont la profondeur, pour ne pas dire la spiritualité, est celle de la sédimentation des influences qui l’ont construit année après année. Mais loin d’être une aventure en solitaire, ce fruit mûr est résolument collectif, prêt à venir à la rencontre de ses publics. Les voyageurs et leurs propres palais mentaux sont attendus dès à présent.

Denis Desassis

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